Mike Portnoy’s Shattered Fortress : un concert magistral au 013

Ce jeudi 6 juillet, le Poppodium 013 de Tilburg recevait la légende du rock progressif, Mike Portnoy dans le cadre de sa tournée solo intitulée Shattered Fortress (en référence à l’un des titres de sa célèbre 12 Steps Suite). Un concert très attendu en ce lieu mythique où il a enregistré la majorité de ses albums live et qui était bien entendu sold-out depuis pas mal de temps.

 

 

Alors, on peut s’étonner d’un tel engouement pour ce qui est assez singulier en soit : une tournée solo d’un batteur aux multiples projets. C’est que ce monsieur n’est pas n’importe qui.

Pour ceux et celles qui ne le connaitraient pas encore, Mike Portnoy, c’est LA référence en matière de batterie. Sacré plus de 29 fois meilleur batteur au monde par le très renommé Modern Drummer Magazine, Mike Portnoy ne compte plus les récompenses engrangées au fil des ans.

 

 

Admiré dans le monde entier pour sa technique complexe et incroyable, Portnoy a aussi été l’un des principaux novateurs en matière d’inovation rythmique et de sonorités au cours des dernières décennies en créant des modèles personnalisés de cymbales et de caisses claires avec les marques Sabian et Tama avec qui il travaille depuis de nombreuses années. Ce qui fait que peu importe le groupe dans lequel il joue, on reconnait toujours quand Mike Portnoy est derrière les fûts.

Durant plus de 25 ans, il fut le leader de Dream Theater (en effet, une fois n’est pas coutume, le leader du groupe n’était pas le chanteur). Mais l’envie d’aller plus loin dans sa créativité le poussera à créer d’autres formations comme Liquid Tension Experiment, Transatlantic où il rencontrera Neal Morse avec qui il deviendra très proche et entamera une collaboration sur ses albums solo, mais aussi dans Flying Colors qui sera un groupe dans un genre un peu hybride entre la pop et le rock progressif. Il continua d’ailleurs à explorer d’autres genres avec Winery Dogs. Mais que l’on ne s’y trompe pas, Mike Portnoy aime aussi taper comme une brute avec ses amis du métal et collaborera aussi à un superbe projet appelé Metal Allegiance. Il officiera aussi brièvement dans le groupe Adrenaline Mob mais devra malheureusement abandonner le projet d’en faire son groupe attitré étant donné son planning trop chargé.

Bref, on peut dire qu’à 50 ans, l’homme a donné énormément au monde de la musique en faisant parfois plusieurs albums par an et se décrivant ainsi comme un « workaholic ».

 

 

Cependant, Mike Portnoy connut aussi une période plus sombre dans les années 90 avec une addiction certaine à l’alcool. Il se disait d’ailleurs assez incontrôlable durant cette période. Mais fort heureusement, Portnoy se reprit au début des années 2000 et poursuivit l’énorme carrière qu’on lui connait.

Il écrivit davantage de chansons au sein de Dream Theater et plus particulièrement un ensemble de cinq chansons qu’il a baptisé 12 Step Suite en référence aux 12 étapes des alcooliques anonymes. Ces cinq chansons, c’est un peu sa Joconde à lui. Un projet pharaonique mené sur plusieurs albums et qui font partie des chefs-d’œuvres incontournables de Dream Theater.

Outre le fait de fêter son 50ème anniversaire, cette tournée était aussi pour Portnoy l’occasion de revisiter pour la première (et sans doute dernière) fois depuis son départ du groupe, le catalogue de Dream Theater.

Autant dire que l’attente des fans était énorme et qu’il fallait des musiciens vraiment au top pour jouer ces morceaux très complexes.

Et justement, Mike Portnoy avait recruté les talents du groupe Haken pour l’accompagner. On retrouvait ainsi Ross Jennings au chant, Diego Tejeida aux claviers, Conner Green à la basse et les guitaristes Richard Henshall et Charlie Griffiths. Ajoutez à cela l’extraordinaire talent d’Eric Gillette pour s’occuper des solos de Petrucci et vous avez là un groupe redoutable.

 

 

 

La soirée s’ouvre tout d’abord sur le groupe Next to None. Le groupe du fils de Mike, Max qui du haut de ses 18 ans, maîtrise déjà ses fûts comme un dieu.

 

 

Accompagné de Thomas Cuce aux claviers et voix, Ryland Holland à la guitare et Kris Rank à la basse, le jeune Portnoy envoi du bois avec ce combo des plus versatile et époustouflant !

 

 

Avec Phases, leur deuxième album fraîchement sorti, les Next To None assurent un spectacle grandiose et, chose rare pour une première partie, la salle est comble et visiblement très attentive au jeu des quatre garçon qui se donnent sans concession sur scène.

 

 

Comme je vous le disais, la musique du groupe est très versatile et passe souvent du coq à l’âne dans un même morceau. Il faut donc bien s’accrocher pour suivre ce TGV en marche. Mais une fois que l’on s’y fait, le groupe laisse une impression très positive.

 

 

Beaucoup de technique, de talent au niveau des compositions et des mélodies ainsi que de la recherche rythmique et sonore. Next To None fait partie de ces groupes qui ont une identité forte qui les rend assez singuliers.

 

 

 

Au bout de ce set incroyable, le public est comblé mais… pas rassasié !

Car il reste bien sûr le plat principal à déguster, le concert du maître Portnoy.

On reprend donc avec un léger rictus en entendant la musique d’introduction. En effet, en bon cinéphile qu’il est, Mike Portnoy a choisi la célèbre musique du film Psychose pour ouvrir le bal.

Le groupe entre en scène sous les applaudissement d’un public en haleine et on démarre avec le tic-tac de l’horloge de Regression, une superbe surprise pour les fans présents. En effet, jouer cinq chansons pour un concert, aussi longue soient-elles, cela aurait fait peu.

Ce soir, Portnoy va régaler ses fans avec des titres phares comme Overture 1928, Strange Déjà Vu avec ce superbe visuel adapté pour chacun des morceaux (ici, le film qui avait servi sur la tournée de l’album en 2000.)

 

 

Mike nous gâte encore avec le très fameux The Mirror. Et, pour avoir assisté au récent concert de Dream Theater célébrant les 25 ans d’Images & Words, nous pouvons vous dire que la prestation de Portnoy et de ce groupe est bien au-dessus de l’original.

On retrouve là une énergie et une sensation très éloignées de la prestation feutrée et trop carrée de Mike Mangini et ce qu’il reste de Dream Theater.

Tout est dit !

 

 

Mike vient au-devant de la scène vers ce public de Tilburg qu’il apprécie tant et nous explique qu’au fond ce concert ne devait être qu’un one shot pour son anniversaire. Mais la demande internationale étant si énorme, le voici donc finalement embarqué dans une tournée solo mondiale avec pour la plupart, des shows soldout. Un batteur qui a un tel succès, c’est du jamais vu !

Mais il est temps d’entamer les choses sérieuses avec la fameuse 12 Step Suite. Une cloche retenti et le public reconnait l’introduction de la célèbre The Glass Prison.

Portnoy est magistral sur ce superbe kit monté pour l’occasion et on ressent ce plaisir qu’il a à nous jouer enfin ce morceau qui ouvre cette pièce maîtresse de son œuvre.

 

 

On enchaînera bien sûre avec This Dying Soul, là aussi, le groupe nous fait oublier totalement ce changement de line-up. Si l’on ferme les yeux, on a l’impression d’être à un concert de Dream Theater, du moins, un concert de l’Age d’Or du groupe.

 

 

Ross Jennings nous impressionne par sa prestance depuis le début du concert. A l’inverse de James LaBrie qu’on avait trouvé effacé lors du concert anniversaire, Ross vient avec sa fraîcheur et sa manière d’interpréter qui donnent un nouveau souffle aux morceaux. Toujours énergique et très gestuel, le chanteur nous emmène avec lui dans chaque chanson.

 

 

Diego Tejeida aura lui aussi impressionné bon nombre de fans avec ses solos parfaits qui ferait fulminer Jordan Rudess.

 

 

On peut aussi saluer le travail d’Eric Gillette qui nous a tout simplement fait oublier l’absence de Petrucci tant son jeu et son interprétation étaient parfaits.

 

 

Après The Root of All Evil, Portnoy prendra le micro pour chanter Repentance, comme pour se repentir lui-même. Un très beau moment qui nous offre une version plus particulière de ce morceau. L’occasion aussi pour nous de nous remémorer les visages derrière les voix que l’on entend sur l’album avec le visuel recréé pour l’occasion.

 

 

On conclut cette suite avec bien entendu The Shattered Fortress (d’où est tiré le nom de la tournée) et c’est sous les applaudissements répétés que le groupe quitte la scène.

 

 

Mais leur disparition sera de courte durée et ils nous offriront encore quelques pépites de l’album Scenes From A Memory avec les chansons Home, The Dance Of Eternity et Finally Free qui permettra à Mike Portnoy de terminer en beauté avec cette fin répétitive qui, soyons honnêtes, est plus destinée à mettre en avant son solo de batterie qu’à clôturer la chanson. Le public se régale sous cette pluie de coups magistraux.

 

 

Une fois de plus, le grand Mike Portnoy nous aura fait vivre une soirée magique faite de souvenirs émouvants et d’une authenticité qui lui est propre.

 

 

En un seul concert, le maître a fait passer le Dream Theater actuel pour un cover band de bas étages et nous aura donné des étoiles plein les yeux.

 

 

Parmi toutes les tournées qu’il aura pu faire, celle-ci restera sans aucun doute la plus mémorable.

 

 

 

A propos Christophe Pauly 485 Articles
Journaliste et photographe du Suricate Magazine