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    Les Veilleurs de nuit de Tiunn Ka-siông, un voyage poétique entre mémoire et légendes à Taïwan 

    Les éditions de L’Asiathèque, spécialisées dans les littératures d’Asie et les dialogues culturels, nous offrent une véritable pépite avec Les Veilleurs de nuit, premier roman du jeune auteur et musicien taïwanais Tiunn Ka-siông. Traduit du taïwanais et du chinois par Gwennaël Gaffric, ce texte singulier mêle avec une rare finesse souvenirs d’enfance, mythes locaux et mémoire collective. Dans la lignée du réalisme magique de García Márquez, l’auteur transforme son village natal, Min-hsiung (devenu le fictif « Bourg-Brûlé »), en un territoire où les frontières entre vivants et morts s’effacent doucement.

    Dès les premières pages, le lecteur est happé par l’atmosphère à la fois réaliste et surnaturelle de ce village taïwanais : on y perçoit la moiteur de l’air, les rumeurs du voisinage, les croyances qui peuplent les nuits, les dieux mineurs et les revenants oubliés. Tiunn Ka-siông tisse son récit de manière fragmentée, alternant souvenirs personnels, légendes locales et récits historiques. Cette construction non linéaire, loin de dérouter, enrichit la lecture : elle reflète la manière dont la mémoire, individuelle et collective, se recompose entre rêve et réalité.

    Ce qui rend Les Veilleurs de nuit véritablement unique, c’est la manière dont l’auteur associe littérature et musique. Chaque chapitre peut être prolongé par une piste sonore issue de l’album du groupe Tsng-kha-lâng, fondé par l’auteur lui-même. Les QR codes intégrés au livre invitent à écouter ces morceaux aux sonorités rituelles ou atmosphériques, créant un pont fascinant entre texte et musique. C’est une expérience rare, immersive, où la lecture se prolonge dans l’écoute, et où la poésie des mots dialogue avec celle des sons.

    À travers le regard du narrateur, on découvre une enfance marquée par les croyances populaires, la superstition et les relations familiales complexes. La figure de Tsiu Bí-hui, amie d’enfance du narrateur, incarne cette frontière fragile entre le monde des vivants et celui des esprits. Le roman devient ainsi une fresque sur la transmission, la mémoire et la manière dont les légendes permettent de dire l’indicible, notamment les traumatismes politiques liés à l’histoire taïwanaise, comme les répressions de 1947.

    La lecture peut parfois sembler exigeante, en raison des nombreuses notes de bas de page ou des récits enchâssés, mais cette densité fait partie du charme du texte. Elle témoigne de la richesse culturelle du Taiwan rural et de la profondeur du travail de l’auteur. Loin d’un simple roman, Les Veilleurs de nuit est une invitation à découvrir un univers à la fois poétique et spirituel, où les traditions, les fantômes et la musique composent une symphonie mémorielle.

    En définitive, Les Veilleurs de nuit est une œuvre rare, à recommander à des lecteurs curieux, désireux de s’ouvrir à d’autres cultures et de se laisser emporter par une écriture à la fois sensible, onirique et profondément ancrée dans la réalité taïwanaise. Une expérience littéraire et musicale qui ne laisse pas indemne, et qui donne surtout envie d’en savoir plus sur cette île fascinante et ses légendes oubliées.

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    Titre : Les Veilleurs de nuitAuteur.ice : Tiunn Ka-siôngÉditions : L’asiathèqueDate de parution : 08 octobre 2025Genre : Roman Les éditions de L’Asiathèque, spécialisées dans les littératures d’Asie et les dialogues culturels, nous offrent une véritable pépite avec Les Veilleurs de nuit, premier roman du jeune auteur et musicien taïwanais Tiunn Ka-siông....Les Veilleurs de nuit de Tiunn Ka-siông, un voyage poétique entre mémoire et légendes à Taïwan