Les filles sages vont en enfer, un récit d’émancipation

Couverture de la BD « Les filles sages vont en enfer » de Tohar Sherman-Friedman (Delcourt, 2021)

Scénario et dessin : Tohar Sherman-Friedman
Éditeur : Delcourt
Sortie : 13 octobre 2021
Genre : Roman graphique, Autobiographie

Dans Les filles sages vont en enfer, la jeune dessinatrice israélienne Tohar Sherman-Friedman évoque son enfance dans une colonie juive orthodoxe de Cisjordanie et sa prise de distance avec la religion à l’adolescence. Une perte progressive de la foi qu’elle présente comme le résultat de plusieurs moments clés.

Grandir dans une communauté juive orthodoxe

Tohar est la septième fille d’un rabbin juif orthodoxe installé dans une colonie de Cisjordanie. La mère de Tohar, très active professionnellement, est souvent partie, laissant la petite dernière seule à la maison. Face à ces parents aimants et pourtant absents, Tohar développe une personnalité critique et rebelle. Elle se sent différente des autres filles de son école religieuse et se fait des amis en dehors de la communauté orthodoxe, grâce notamment à l’une de ses sœurs qui habite Tel Aviv et la prend sous son aile.

Une succession de souvenirs

Les illustrations très vivantes et colorées, accompagnées d’un récit à la première personne, donnent l’impression de lire un journal intime. Structuré en trois parties, Les filles sages vont en enfer n’est pourtant pas un récit linéaire. Il s’agit plutôt d’un recueil de souvenirs, de moments charnières qui ont mené Tohar à remettre en cause sa croyance en Dieu. Certaines scènes sont transformatives, comme la découverte de l’amour ou de la vie dans la grande ville de Tel Aviv. D’autres sont en apparence assez insignifiantes, mais ont néanmoins marqué Tohar. C’est d’ailleurs cet aspect qui donne à l’album son originalité. L’autrice-dessinatrice décrit ses sentiments sans forcément les expliquer ni en donner une interprétation cohérente. Elle ne cherche pas à convaincre ni à justifier ses choix, mais seulement à décrire son parcours d’émancipation, ce chemin qui l’a mené à rompre avec les croyances de sa communauté sans pour autant renier sa famille.

Les filles sages vont en enfer est un album subtil qui se lit d’une traite et se veut avant tout le reflet d’une expérience unique et individuelle. En fin d’ouvrage, des notes (qui auraient gagnées à être intégrées au fur et à mesure des chapitres pour plus de lisibilité) fournissent au lecteur peu familier des traditions juives orthodoxes des éléments de contexte utiles pour mieux comprendre le cheminement de Tohar.

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