« Les Dossiers Blackwood », quand le mal s’invite en vous

Titre : Les Dossiers Blackwood, Les avides
Auteurs : Guillermo Del Toro et Chuck Hogan
Editions : Pygmalion
Date de parution : 3 février 2021
Genre : Polar

Bien connu pour son travail derrière la caméra, Guillermo Del Toro l’est un peu moins pour ses tentatives littéraires. Pourtant, le réalisateur mexicain n’en est pas à son coup d’essai. On lui doit quelques ouvrages indépendants mais surtout une première trilogie, La Lignée, également coécrite par Chuck Hogan. Les Dossiers Blackwood partage d’ailleurs avec ce premier triptyque bien plus que le format trois livres, une structure narrative qu’on pourrait juger éculée – l’agent du FBI confronté à un mystère inéluctable, à ceci près qu’ici il n’est plus question de vampires mais de diables.

Odessa Hardwicke est une agente tout ce qu’il a de plus réglementaire – comme tous les personnages du livre, elle est à la hauteur du cliché qu’elle représente, celui de la gentille investigatrice dévouée et courageuse. Et pourtant, sa vie bascule lorsqu’elle se voit contrainte d’abattre son coéquipier soudainement devenu dangereux. Odessa, écartée par sa hiérarchie, se retrouve seule, avec beaucoup de temps libre et surtout le souvenir de cette fameuse nuit qui la hante. Elle cherche à comprendre ce qui a pu traverser l’esprit de son collègue et ami, sans savoir qu’il s’agit d’une force maléfique.

Dans les faits, malgré un scénario qui ne bouscule pas les genres, il y a de l’inventivité dans ce premier chapitre du dossier Blackwood. L’atout principal du récit est sa construction en paliers, différentes histoires se chevauchent, dépassant les barrières temporelles et spatiales. Mais ce refus de la linéarité est sûrement la plus grande, voire la seule, prise de risque que s’octroient les auteurs dans ce roman qui peine à décoller. Pour le reste, les personnages sont attendus – tous ont l’air d’être des marionnettes dirigées pour répondre aux besoins de l’histoire. Et le récit lui-même demeure peu convaincant. La petite trouvaille (qui n’est malheureusement pas assez exploitée) du duo Del Toro/Hogan, c’est le mystère qui entoure la petite boîte aux lettres, reliée à aucune porte, qui accueille le courrier sans ne jamais déborder et dont la description en quelques pages plonge le lecteur dans l’atmosphère d’un Londres brumeux et magique.

Donc oui, on connaissait Del Toro derrière la caméra, son univers travaillé et fantasmagorique – très différent, malheureusement de ses écrits qui restent trop en surface. Les avides vient s’ajouter à la longue liste de livres divertissants, qu’on dévore très facilement mais dont il manque encore quelque chose. Mais qui sait, la suite nous réservera peut-être des surprises.