Titre : Le journal De Samuel
Auteur.ice : Emilie Tronche
Edition : Casterman
Date de parution : 21 mai 2025
Genre du livre : Roman graphique
La route du succès ne s’arrête pas pour le personnage fictif de Samuel, dix ans, qui, après une première saison d’animés diffusés sur Arte.tv, obtient son propre roman graphique. Mais une adaptation de la série phénomène était-elle vraiment nécessaire ?
Pour ceux qui ne le connaissent pas, on pourrait dire grossièrement que Samuel est une version dépoussiérée de Cédric. Une tête blonde qui raconte les drames de l’enfance. D’ailleurs, il commence son journal par une tragédie. Basile qui « aime trop se mêler de tout » a dit à la grande Julie que Samuel était amoureux d’elle. Et comme une aventure n’arrive jamais seule, la suite promet d’être mouvementée. Le jeune Samuel consigne dans son journal ce qu’il traverse avec une passion enfantine : le passage au collège, la honte des premiers émois, les vacances avec les cousins ou encore la descente de la mort qu’on emprunte quand la tristesse s’invite.
Pour les nombreux qui ont mordu à la série – 50 millions de vue quand même – le talent d’Emilie Tronche ne fait aucun doute. Son secret ? Convaincre aussi bien les gamins qui traversent cette étape, que les ados qui viennent d’en sortir et les jeunes adultes qui se reconnaissent dans les obsessions enfantines du début des années 2000. Car Samuel, comme son autrice, semble être un bébé des années nonante. L’album n’est pas directement daté, mais aucun millennial ne peut s’y tromper. C’est l’époque bénie des Diddl échangés à la récréation et des Nono dans les cartables. L’époque des 3310, des chats MSN et des ordinateurs aux allures de micro-onde. L’histoire de Samuel se veut universelle, mais pour toute une génération, elle est aussi source de nostalgie.
Et puis Emilie Tronche joue la carte de la simplicité. Celle qui rêvait un jour d’être chorégraphe privilégie un dessin aux traits qui, dans leur attitude, rend les personnages vivants. Son univers est expressif et plein d’une sincérité enfantine qui le rend désarmant. L’innocence dont déborde ses illustrations se retrouve également dans sa manière d’écrire. Comme un enfant, elle glisse des mots compliqués qui dénotent avec la simplicité des phrases. Elle utilise un ton parfois sarcastique et, surtout, fait preuve d’une prédisposition naïve pour le drame. Le journal de Samuel fonctionne, car il montre avec justesse ce qui définit l’enfance.
Puisque la série est incroyable, le roman graphique ne pouvait pas être mauvais. Mais à quoi sert une adaptation si elle n’ajoute rien à l’œuvre originelle ? La version bande dessinée de Samuel est un condensé des 21 épisodes disponibles sur Arte. L’exercice est compliqué. Mais en l’état, l’autrice donne l’impression d’avoir transféré le contenu sans explorer les possibilités qu’offrait ce changement de médium. En d’autres termes, elle a abandonné ce qu’elle ne pouvait transposer, mais sans vraiment chercher à le remplacer. Une des forces de la série, par exemple, vient de son set-up musical. Mais une bande son est effectivement plus compliquée à intégrer dans un livre que dans une série animée, même si à ce manque, Emilie Tronche pâlie en proposant, en fin d’ouvrage, la playlist disponible via un QR code. Sans son potentiel musical, et à cause du caractère plus saccadé et plus concis de la bande dessinée, l’adaptation peine à faire naître les mêmes émotions que la série. Mais Le journal de Samuel souffre de la comparaison, parce que la bande dessinée, prise de manière isolée, est adorable.