La Tête haute d’Emmanuelle Bercot

LA TÊTE HAUTE de Emmanielle Bercot LES FILMS DU KIOSQUE

la tete haute affiche

La Tête haute

d’Emmanuelle Bercot

Drame

Avec Catherine Deneuve, Rod Paradot, Benoît Magimel, Sara Forestier, Diane Rouxel

Pour son quatrième long métrage, Emmanuelle Bercot retrace le parcours d’un jeune à difficultés, de ses premiers écarts à la possibilité de sa rédemption, en passant par les moments les plus difficiles de sa réinsertion. Après avoir participé à l’écriture de Polisse de Maïwenn, et recueilli les faveurs de la critique avec Elle s’en va en 2013, voici donc Bercot catapultée à l’ouverture du Festival de Cannes, avec un film plein de qualités.

Depuis l’âge de 6 ans, Malony est contraint de se présenter devant une juge pour mineurs, à intervalles réguliers, partagé entre une mère négligente et des petits larcins commis ci et là. Autour de ses 16 ans, il est envoyé dans un centre d’éducation, toujours suivi de près par la juge et par son nouvel éducateur, lui-même rescapé d’une jeunesse difficile. Là, il rencontre Tess, une jeune fille qui sera peut-être à l’origine de sa rédemption.

Si le sujet du film et le passif de Bercot – la tendance à l’hystérie collective de Polisse, et la prétention « pittoresque » d’Elle s’en va – faisaient un peu peur, La Tête haute surprend et séduit par ses choix scénaristiques. En suivant Malony sur une courte période de son adolescence, et en centrant sa dramaturgie sur les rapports du jeune garçon à l’autorité, puis sur sa relation avec sa petite amie, Emmanuelle Bercot trouve un baromètre idéal, une ligne de laquelle ne pas dévier, qui donne de la constance et du rythme à son film. Les scènes dans le bureau de la juge sont en cela déterminantes ; elles ponctuent le film de manière régulière et lui donnent aussi bien sa substance que sa forme. Elles dirigent la destinée de Malony et par là même celle du scénario, puisque des décisions prises lors de ces rencontres découlent les situations dans lesquelles sera plongé le protagoniste.

Mais ce qui impressionne le plus dans La Tête haute, c’est sans conteste le casting – et la direction d’acteurs –, uniformément excellent. Catherine Deneuve est parfaite en caution de sagesse qui englobe le film de sa bienveillance, et la jeune Diane Rouxel est une vraie révélation, faisant pleinement fonctionner la relation entre son personnage et celui de Malony. Mais c’est surtout un duo d’hommes qui est le plus fort : celui formé par Rod Paradot, interprète de Malony, et Benoît Magimel, l’éducateur. Le film établit une vraie filiation entre les deux personnages – ils ont tous deux des parcours que l’on imagine voisins – mais ce lien est également renforcé par une ressemblance purement physique. C’est au casting que s’est joué une grande partie de cette relation forte entre les deux personnages, puisque l’on ne peut pas s’empêcher de voir en Rod Paradot un jeune Benoît Magimel, tant sur le plan physique que sur celui du jeu, dans une colère rentrée mais toujours prête à exploser. Ce passage de relais entre deux acteurs a quelque chose de bouleversant. Rod Paradot donne à lui seul le pouls du film, et Magimel n’a pas été aussi bon depuis longtemps.

Le film n’est pas exempt de défauts, d’autant plus qu’il reste dans un style naturaliste assez classique, mais le réalisme est ici surtout prétexte à créer du romanesque et des moments de cinéma. Il faut adhérer au parti pris de mise en scène que l’on rencontre trop souvent dans ce type de projet – caméra à l’épaule, plans serrés,… – mais il est en l’occurrence totalement au service du sujet et des personnages. La Tête haute n’est sans doute pas un grand film, et on comprend qu’il soit présenté hors compétition à Cannes. Il reste en effet ancré dans une certaine tradition du cinéma français, à mi-chemin entre réalisme et « film à stars », qui n’a peut-être pas sa place dans une sélection tentant de se faire l’écho d’une diversité de cinémas d’auteurs internationaux. Mais le film représente malgré tout très bien le cinéma que veut faire Emmanuelle Bercot : centré sur les acteurs, humaniste et bouillonnant.

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