Je crois que dehors c’est le printemps : quand tragédie rime avec espoir

© Chiara Pasqualini

Texte de Concita de Gregorio. Adaptation théâtrale de Gaia Saitta. Mise en scène de Gaita Saitta et Giorgio Barberio Corsetti. Avec Gaia Saitta. Du 9 mai au 12 mai 2023 au Théâtre National.

Perdre un être proche est une épreuve ardue pour la personne qui reste. Perdre un enfant est la douleur même. C’est ce que nous explique Gaia Saitta dans son adaptation théâtrale du texte de Concita de Gregorio, mais c’est surtout ce qu’a vécu Irina, lorsqu’elle a perdu ses deux filles. Et pourtant, ce fait divers terrible ne nous est pas conté comme un drame sans issue, mais comme un tunnel sombre au bout duquel nous est délivré un message d’espoir : Je crois que dehors c’est le printemps.

Nous sommes accueillis dans la salle par Irina (Gaia Saitta), seule en scène… mais pas pour très longtemps. Au fil des entrées, la comédienne invite certains spectateurs à la rejoindre sur scène. Des chaises sont disposées stratégiquement sur les bords du plateau et un décor très sobre nous est présenté : un bac de terre avec une paire de chaussures mystérieuse, un chariot roulant avec divers objets, une caméra sur pied et deux écrans, ainsi qu’une projection du texte en anglais qui réjouira les anglophones amateurs de théâtre. Petit à petit, chaque chose prend vie sous nos yeux et, tout comme les membres du publics sélectionnés, tout comme les diffusions vidéos qui apparaissent de ci de là, elles accompagnent Irina dans son récit. Son récit de vie.

L’histoire débute par une présentation de la comédienne et termine de même. Au centre, proche de son public, l’incluant même et allant jusqu’à flouter les limites du quatrième mur, Irina nous raconte et nous montre à la fois. Elle nous raconte son ressenti, son vécu, ses émotions. Et elle nous montre ses rencontres, ses discussions, ses déceptions et ses espoirs… Ces personnes à laquelle elle s’adresse sont incarnées par les membres du public choisis et projetées sur grand écran. Si la ligne directrice de l’histoire est parfois confuse et que nous aurions apprécié davantage de rupture entre ce qui est raconté et ce qui est montré, la symbolique est forte et le message est beau. Gaia Saitta est touchante malgré quelques bafouillages, qu’au vu de son bilinguisme nous pardonnons volontiers, et elle semble parvenir à faire oublier au spectateur auquel elle s’adresse la potentielle gêne d’être diffusé sur grand écran, au point qu’à plusieurs reprises, nous observons des réponses gestuelles à ses propos. Le choix d’inclure le spectateur de cette manière nous semble symboliquement très juste et par ailleurs très simplement mais efficacement mis en scène. Tout comme Irina a rencontré les acteurs de sa vie : sa grand-mère, sa psychologue de couple, la juge ou encore la police… Gaia, quant à elle, va à la rencontre d’acteurs d’un jour.

Si nous éprouvons quelques difficultés à nous connecter à nos propres émotions, Je crois que dehors c’est le printemps demeure une pièce émotionnellement très forte avec une superbe symbolique. Nous en apprécions la poésie. C’est un sujet dramatique et pourtant, il nous donne de l’espoir en nos propres ressources : c’est un appel à la vie et un appel à l’amour.