Destroyer, un « Gérard » pour Nicole !

Destroyer
de Karyn Kusama
Policier, Thriller, Drame
Avec Nicole Kidman, Toby Kebbell, Tatiana Maslany
Sorti le 13 mars 2019

Il y a seize ans, la détective du LAPD Erin Bell (Nicole Kidman) était infiltrée dans le cadre d’une mission secrète dans le désert californien. Elle rejoignait ainsi la bande corrompue menée par le brutal Silas. Alors que l’un de leurs braquages de banque tourne mal, Erin est démasquée, mais échappe à Silas. Seize ans plus tard, Silas est de retour : plus grand, plus puissant et plus dangereux que jamais, il a mis au point un plan pour attaquer la plus grande banque. Cette fois, Erin l’en empêchera.

Nicole Kidman serait-elle à la recherche du rôle de sa vie ? En voyant Destroyer, on se pose la question. D’autres acteurs ou actrices ont pris le risque de changer leur physique. Certains en suivant un régime spécial pour prendre ou perdre du poids (Christian Bale pour Vice). D’autres en revanche ont pris le parti de se faire maquiller pour se rendre laids (Charlize Theron dans Monster). Tous ces rôles sont devenus, par la qualité de l’interprétation et du maquillage, ce qu’on appelle des rôles « oscarisables ». Dans Destroyer, on peut dire que Nicole Kidman a (presque) inventé le rôle « gérarisable », en référence aux « Gérard » donnés pour les pires performances cinématographiques de l’année.

Dès sa première apparition, on sent que le film va forcer le trait de ce personnage voulu marginal et brut. Un gros plan et la supercherie du maquillage saute aux yeux du spectateur qui finit par ne voir que ça : Nicole Kidman maquillée en vieille flic ravagée. L’illusion est ratée et le cours du récit n’aide pas non plus. On essaie de nous vendre un film noir dans lequel la vengeance d’une femme va nous entraîner dans les méandres de son passé douloureux de flic infiltrée, mais on finit par suivre un personnage sans charisme, sans humour et peu crédible. Pire, la réalisatrice nous livre des flashbacks avec une Nicole jeune et resplendissante, ce qui accentue la grossièreté du maquillage.

Pour ce qui est de l’intrigue, le suspense est factice et téléphoné, les personnages secondaires sont inexistants et le petit ami qui est à l’origine de son déclin a le charisme d’une huitre d’eau douce. Le système des flashbacks, concept déjà éculé, est sans surprise et nous plonge dans une sorte d’histoire de braquage du niveau d’une série de seconde zone. On n’omettra pas de mettre de la violence gratuite et bien sanglante, de la torture justifiée par la soif de vengeance et un soupçon de sexe dépravé. L’ensemble donne un film indigeste et interminable. Pour la fin, je vous donnerai un indice : c’est Émile le tueur.

Entre « revenge movie » et « film noir », ce film n’atteint aucune des ambitions qu’il semblait avoir au départ. Sans suspense, sans personnage crédible et beaucoup trop long, Destroyer est sans doute l’une des plus grandes déceptions de ce début d’année. Un film à oublier au plus vite.

A propos Bruno Pons 45 Articles
Journaliste du Suricate Magazine