Databiographie : raconter l’humain à l’ère du big data

Couverture du livre « Databiographie » de Charly Delwart (Flammarion, 2019)

Titre : Databiographie
Auteur : Charly Delwart
Éditions : Flammarion
Date de parution : 28 août 2019
Genre : Biographie

Databiographie est un livre de type expérimental dans lequel Charly Delwart tente d’analyser sa vie au moyen de données statistiques présentées sous forme graphique. À l’ère du big data, le résultat est à la fois amusant et intéressant.

Peut-on quantifier sa vie ?

Depuis quelques années, les données numériques produites par les individus ont explosé. Services en ligne, identité numérique, réseaux sociaux, messagerie instantanée… Chacun de nous laisse chaque jour de nombreuses traces de ses interactions sur internet. L’ensemble de toutes ces données individuelles forment, entre autres, le big data ou « métadonnées ».

Corollaire de cette évolution, la visualisation des données est de plus en plus prisée. En effet, la réalisation de graphiques est un bon moyen de « faire parler » les chiffres en dévoilant des tendances, des équilibres… pas toujours visibles dans la liste de données brutes.

Curieux de ces développements, l’écrivain et scénariste belge Charly Delwart a voulu tenter une expérience pour mieux comprendre l’impact du big data sur la vie des individus. Peut-on résumez sa vie au moyen de graphiques ? Peut-on, grâce aux données disponibles, se situer en tant qu’individu dans la masse humaine ?

Un autoportrait intime qui est aussi celui d’une époque

Dans Databiographie, Charly Delwart présente une série de graphiques combinant des données personnelles sur sa vie et des statistiques à portée générale (données démographiques, sociologiques ou économiques). Regroupés par thèmes (« vie intérieure », « famille », « corps », « religion », etc.), les graphiques sont complétés de commentaires libres, évoquant souvent des pensées intimes ou des souvenirs d’enfance.

L’auteur n’hésite pas à dévoiler certains détails intimes de sa vie, comme lorsqu’il évoque le nombre de disputes au sein de son couple ou les « principales positions sexuelles utilisées ». La mise en perspective de ses faiblesses par rapport à des statistiques générales (par exemple le fait que ses phobies comptent parmi les dix phobies les plus répandues) permet par ailleurs de générer une certaine forme de déculpabilisation.

Car c’est bien l’un des intérêts principaux de l’analyse de données souligné par Databiographie : la possibilité qui nous est désormais offerte de nous comparer aux autres dans presque tous les domaines de la vie. Nombre d’amis sur Facebook, nombre de likes sur Tinder… La valeur de notre existence est-elle proportionnelle à notre « écho » dans le monde numérique ?

Et l’humain – et l’humour – dans tout ça ?

Ce n’est bien évidemment et heureusement pas le cas. Databiographie a toutefois le mérite de poser ces questions de manière très concrète en nous faisant réfléchir à la façon dont nos données personnelles sont utilisées – par nous, mais aussi et surtout par des tiers.

En réalité, ce ne sont pas dans les graphiques mais bien dans les commentaires de l’auteur que l’on trouve la « vraie » biographie de Charly Delwart. Les données apparaissent finalement comme une sorte de prétexte à la confidence et à l’évocation des souvenirs. Le ton plein d’humour et d’autodérision de l’auteur nous rappelle ainsi que ce qui fait un individu reste inquantifiable et inimitable. Et c’est tant mieux !

Charly Delwart présente Databiographie

A propos Soraya Belghazi 378 Articles
Journaliste