Cro Man, ou le choc des âges

Cro Man

de Nick Park

Animation, comédie

Avec Tom Hiddleston, Eddie Redmayne, Maisie Williams

Sortie le 7 février  2018

« C’est un trou de verdure » au beau milieu du désert des Terres Moches. Des petits hommes de pâte y arpentent les petits chemins slalomés, à la chasse au lapin ou la cueillette des fruits. Dug, petit homme des cavernes, appartient à la dernière petite tribu d’humains issue de l’âge de pierre. Contrairement au chef de sa tribu qui estime qu’ils ne sont que de « simples chasseurs de lapin », Dug rêve de partir à la chasse au mammouth avec son compagnon Crochet. Un jour, Lord Nooth, un puissant et narcissique avare du nouvel âge de bronze, vient déranger le calme de la vallée de la petite tribu de Dug, détruisant leur camp et y creusant une mine. Soudain, les Cro-Magnon sont dépossédés de leur vallée et se retrouvent à errer au sein des Terres Moches. Mais ils ne s’avouent pas vaincus ! Afin de récupérer leur vallée, ils décident de défier les champions de l’âge de Bronze, le « Real Bronzio », à un jeu qu’ils n’ont jamais joué : le football…

Fidèle à sa marque de fabrique, Aardman relève à nouveau merveilleusement le défi d’un univers tout en pâte à modeler, et ce, sans tomber dans une sorte de remake de Wallace et Gromit. En effet, l’histoire de Cro Man est réellement neuve dans l’univers de ce Studio unique, et traite habilement d’un sujet qui est, pour certains, aisément ennuyeux voire inintéressant. Si on y reconnait sans l’ombre d’un doute le Championnat d’Europe et même plus particulièrement la qualification de l’équipe amateur islandaise pour l’Euro 2016, ce sport d’équipe est souvent un prétexte narratif pour amener de manière ludique et fictionnelle des questions politiques, socio-économiques et psychologiques. Le clash des âges peut notamment être perçu comme un choc des civilisations, et la destruction du camp de Doug rappelle, peut-être involontairement, la destruction des favelas et la délocalisation forcée de leurs habitants lors de la Coupe du Monde au Brésil. Les dessins dans la mine, quant à eux, posent la question de l’héritage et de la similarité d’un peuple avec ses ancêtres. Enfin, les différents personnages ont tous un message à faire passer : la talentueuse joueuse de football, Goona, insiste sur l’importance du féminisme ; Lord Nooth nous met en garde contre l’avarice et la corruption ; le capitaine du « Real Bronzio » contre les travers du narcissisme ; et surtout, Dug démontre qu’il est important de se montrer solidaire envers les siens, sans pour autant abandonner la poursuite de ses propres projets.

Les touches d’humour ne manquent pas non plus dans cette (pré-)histoire, et il y en a pour tous les goûts et tous les âges. Qu’il s’agisse de la reine « Oofeefa », du massage de Crochet, de la mère inappropriée ou de la messagerie vocale en forme d’oiseau, l’humour de Cro-Man allège avec habileté les enseignements de ce que l’on pourrait être tenté d’appeler un Bildungsroman cinématographique.

Conclusion : à voir sans tarder !

A propos Mathilde Wynsdau 9 Articles
Journaliste du Suricate Magazine