
Bugonia
Réalisateur : Yorgos Lanthimos
Genre : Comédie, Science-Fiction
Acteurs et actrices :Emma Stone, Jesse Plemons, Aidan Delbis
Nationalité : Corée du Sud, USA
Date de sortie : 29 octobre 2025
Emma Stone et Jesse Plemons sont les protagonistes de la dernière comédie noire du réalisateur grec, où la paranoïa est le maître mot.
La première collaboration entre Yorgos Lanthimos et Emma Stone remonte à 2018 avec La Favorite, le film qui a consacré le réalisateur grec à Hollywood et qui, d’une manière presque intuitive ou prophétique, a marqué le début d’un partenariat artistique désormais presque décennal, culminant avec son dernier long métrage, Bugonia.
Présenté à la Mostra de Venise, Bugonia est le remake du film sud-coréen Save the Green Planet! (2003), dont Lanthimos reprend les éléments les plus aboutis et fascinants, transformant l’œuvre de Jang Joon-hwan en une réflexion sur la société américaine post-Covid et sa tragicomicité.
Le film suit Teddy, un jeune white trash qui vit avec son cousin fragile, Don. Passionné d’apiculture et profondément en colère face à la destruction progressive de l’écosystème, Teddy rend responsables les conglomérats pharmaceutiques dirigés par Michelle Fuller, une PDG glaciale dont l’entreprise serait également à l’origine de la dégénérescence de la mère malade de Teddy.
Méfiant envers les médias et profondément troublé, Teddy est un ouvrier issu des couches les plus vulnérables de la société américaine. Avec son cousin à ses côtés, il développe la conviction paranoïaque que Michelle est en réalité une extraterrestre, membre de l’espèce des Andromedans, décidée à anéantir l’humanité. Persuadé de ses théories, il parvient à kidnapper Fuller et à l’enfermer dans sa cave, convaincu d’agir pour sauver l’avenir du genre humain.
Dans l’ensemble, Bugonia s’impose comme une comédie réussie. Dense, foisonnante et traversée de multiples niveaux de lecture, l’œuvre de Lanthimos gagne en tension à mesure qu’elle avance, parvenant à rendre cinématographiquement captivant un sujet aussi glissant que celui des théories du complot, évoquant parfois la radicalité visuelle du cinéma de Lars von Trier. Pourtant, malgré des performances remarquables — une Emma Stone glaciale, un Jesse Plemons magistralement paranoïaque — et la musique envoûtante de Jerskin Fendrix, Lanthimos oscille entre la rigoureuse cohérence formelle de sa mise en scène et un universalisme teinté de moralisme qui, sans affaiblir la puissance de sa comédie de l’absurde, tend parfois à en banaliser le propos.
Profondément ancré dans son époque, le dernier film de Lanthimos demeure solide et cohérent, quoique moins audacieux que Kinds of Kindness et moins abouti que Poor Things. Il appartient désormais au public de juger si la réponse que le cinéaste propose à l’autodestruction délibérée — et désormais manifeste — de l’humanité est réellement à la hauteur du sujet qu’il aborde.
