
Good One
Réalisatrice : India Donaldson
Genre : Drame
Acteurs et actrices : Lily Collias, James LeGros, Danny McCarthy
Nationalité : USA
Date de sortie : 14 mai 2025
Quoi de mieux qu’une randonnée dans la nature — cet environnement neutre, ouvert et apaisant en apparence — pour refléter la société patriarcale dans laquelle nous évoluons. Good One est un film intimiste, lent et poétique, qui provoque une sensation dérangeante, un sentiment diffus de malaise qui s’infiltre doucement, presque naturellement, jusqu’à faire pleinement sens dans les dernières minutes du film. L’inconfort s’installe progressivement, un spleen insondable, et petit à petit, la randonnée à l’air libre devient étouffante. La nature se transforme alors en huis clos symbolique, un piège silencieux où tout finit par se resserrer autour de l’héroïne.
Sam, une jeune adolescente, part en randonnée avec son père divorcé et Matt, l’ami de ce dernier, qui vient lui aussi de divorcer. Sam a ses règles. Tout au long de la randonnée, elle pallie la désorganisation de Matt : elle gère la nourriture, son eau, son sommeil, elle s’assure qu’il va bien. Matt tient la conversation. Matt est drôle. Sam a ses règles. Sam compense aussi le manque de sensibilité de son père, qui ne voit pas que son ami boit trop, qu’il va mal. Elle a ses règles. Son père ne pose pas de questions. En fait, Sam porte tout, tolère tout et arrondit les angles… jusqu’à ce que Matt aille trop loin.
Sam et ses règles, c’est le leitmotiv glaçant qui revient sans cesse, soulignant la violence silencieuse qu’elle endure, la fatigue invisible, la maturité forcée, la charge mentale à la fois matérielle et émotionnelle que cette adolescente supporte. Good One est une œuvre vibrante, douce et profonde. Les dialogues, rares, s’appuient sur des plans magnifiques, qui se succèdent avec naturel, portés par une bande originale immersive. Rien n’est dit frontalement, mais tout est suggéré. Comme le son, la couleur est omniprésente, faisant de ce film une expérience aussi visuelle qu’auditive.
Le film révèle les failles de deux générations, de deux éducations, des rapports entre hommes et femmes. Jamais grossier, toujours subtil, Good One montre comment Sam endure les clichés, les remarques, le mansplaining, les allusions douteuses. Les hommes sont ambivalents : parfois attachants, souvent rustres, drôles, mais jamais inoffensifs. C’est justement cette banalité qui dérange. Le spectateur, comme Sam, ne sait pas toujours comment se positionner devant ce qui lui est autant familier. Car ces hommes ne sont pas « méchants », mais ils sont pourtant la cause de ce malaise omniprésent.
Good One raconte une violence sourde, une oppression feutrée qui s’installe dans le silence, dans les gestes, dans les regards. La marche devient l’allégorie du poids qui pèse sur Sam, et la nature, l’antichambre d’un sexisme latent.