Le Violoniste de Mechtild Borrmann

auteur : Mechtild Borrmann
éditions : Le Masque
date de sortie : 20 août 2014
genre : Polar, historique

Mai 1948, Moscou. Alors que l’accord final du concerto résonne encore dans la salle où se déploient les applaudissements, le destin du violoniste prodige Illia Grenko bascule. Arrêté à la sortie de son concert puis incarcéré à la Loubianka, siège du KGB, il ne se doute pas qu’il ne reverra ni son précieux stradivarius, ni sa famille.

Avec Le violoniste, Mechtild Borrmann nous plonge dans la noirceur du régime stalinien et donne à voir le quotidien de ceux qui, comme Illia, ont été condamnés à l’enfer du goulag. Le destin d’Illia et sa famille aurait pu s’évanouir dans la mémoire collective, aux côtés de destins similaires et tout autant gâchés des victimes du totalitarisme. Pourtant, soixante ans plus tard, l’histoire semble frapper à la porte de Sacha Grenko, le petit fils d’Illia, soufflant sur la vie du jeune allemand un air de rancœur et le besoin urgent de mettre la lumière sur la malédiction qui frappe sa famille. Où est passé le violon de son grand-père ? Et si ce stradivarius était la clef d’un mystère qui s’étend sur deux générations ?

La structure habile du roman nous fait voyager aux côtés d’Illia que l’on suit, non sans effroi, dans les profondeurs des bassins miniers de la Petchora, aux côtés de sa femme Galina au Kazakhstan, qui tente de survivre à l’enfer de l’exil, et au cœur de l’enquête menée par Sacha des années plus tard. Le précieux stradivarius pourrait valoir des millions et il se peut qu’il soit convoité au point de faire porter sur la famille Grenko le lourd tribut de sa perte. Au fil des révélations, le jeune allemand voit l’étau se resserrer sur lui dans une course poursuite dont il peine à mesurer l’étendue des motifs.  L’enquête le mènera bien plus loin que la résolution d’un mystère : la découverte de soi, de ses racines et de son histoire. A mesure que se déplie le récit, les trois destinées se rapprochent, se démêlent, et s’alignent, pour ne plus converger que vers un point, le centre du kaléidoscope, dans lequel on attend que la vérité éclate.

Malgré une intrigue agile et claire qui parvient à doser le juste équilibre entre les différents protagonistes, l’aspect historique l’emporte finalement sur l’enquête. L’intérêt de ce roman réside donc dans les photographies des visages sombres, des mains gercées, des corps exsangues et la neige qui recouvre le camp de Vorkouta qu’on surnommait « la guillotine glacée ». La lumière vient du bord, des contours et des ondulations de l’histoire. Finalement, l’objet le plus convoité du Violoniste n’est pas le violon mais bien la vérité, cette de l’Histoire. Et l’envie de nous plonger, ou nous replonger, dans l’Archipel du Goulag

A propos Emilie Sakai 4 Articles
Journaliste du Suricate Magazine

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