Un Ange, un film qui roule sur la jante

Un Ange

de Koen Mortier

Drame

Avec Vincent Rottiers, Fatou N’Diaye, Paul Bartel

Sorti le 19 septembre 2018

Le réalisateur flamand Koen Mortier revient sur le destin fracassé d’un coureur cycliste professionnel dans une adaptation librement inspirée de la mort dans des circonstances troubles de Frank Vandenbroucke.

Basé sur le roman de l’auteur à succès Dimitri Verhulst “Monoloog van iemand die het gewoon werd tegen zichzelf te praten” (son troisième roman porté à l’écran) qui avait déjà fait polémique en son temps, le film raconte les dernières heures de vie de Thierry, un champion cycliste déchu aux prises avec la dépression suite à des déboires amoureux et à des affaires de dopage. Durant un voyage au Sénégal en compagnie de son frère, il fait la rencontre de Fae, une jeune prostituée dont il tombe instantanément amoureux. Sous l’emprise de drogues, Thierry se comporte étrangement durant toute la nuit. Il sera retrouvé mort dans une sordide chambre d’hôtel le lendemain. Placée en garde à vue, Fae devra prouver son innocence. Elle sera très vite disculpée et racontera les derniers moments passés avec le champion maudit.

Bien que les cartes aient été délibérément brouillées sur l’identité du coureur cycliste (nom, région d’origine, enfants…), il n’aura échappé à personne que l’ombre de Frank Vandenbroucke plane sur le dernier film de Koen Mortier. Campé par l’excellent Vincent Rottiers (Dheepan), le champion cycliste névrosé adopte le parler du nord, les regrets et les angoisses de l’enfant terrible du cyclisme belge. Une séquence renvoie à son suicide raté, lorsqu’il s’était allongé dans sa chambre avec un maillot arc-en-ciel, maillot que portent les champions du monde, ce qu’il n’a jamais été. Une autre scène fait un clin d’œil à la nouvelle idole belge, Tom Boonen, victime d’une usurpation d’identité par VDB lors d’une course amateur en Italie en 2006.

Si les interprétations de Vincent Rottiers et de Fatou N’Diaye sont convaincantes, le film n’évite, par contre, pas quelques écueils. En épousant essentiellement le point de vue de la prostituée qui témoigne des dernières heures de vie de l’ancienne star cycliste, le film ne fait que révéler la faiblesse du propos. Que diable pouvait-elle raconter sur cette rencontre ? Son client était ivre et sous l’emprise de drogues. Le film joue pourtant à fond la carte de la romance et perd ainsi en crédibilité. La mise en scène, quant à elle, est trop éparpillée. Elle ne parvient pas à saisir véritablement les causes profondes du drame qui s’est joué ce soir-là. La faute à la multiplication de scènes de cauchemars rocambolesques et à l’emploi abusif de caméra à l’épaule en mode instabilité qui finissent par diluer l’intérêt du récit. L’essoufflement ne tarde pas à se faire sentir, donnant l’impression d’un film bien trop délayé pour ce qu’il avait à raconter.

Un Ange est donc un film qui se noie dans une vaine et pathétique tentative de réhabiliter, à travers une histoire d’amour improbable, un coureur sensible et fragile qui avait tout pour réussir mais qui a été rattrapé par ses démons. Si les intentions du réalisateur sont louables, les moyens mis en place pour y parvenir le sont moins.