Revenge, le dernier canyon sur la gauche

Revenge

de Coralie Fargeat

Action, Thriller

Avec Matilda Lutz, Kevin Janssens, Vincent Colombe, Guillaume Bouchède

Sorti le 21 mars 2018

Jen accepte d’accompagner son compagnon, un homme marié, en weekend de chasse. Ce sera le début d’une longue descente aux enfers.

Après le méconnu Villa Captive (Emmanuel Silvestre, 2011), la production de genre française se penche à nouveau sur le rape and revenge. Pour les non-anglophones, précisons qu’il s’agit là d’un sous-genre principalement articulé autour d’un viol et de la vengeance qui s’ensuit. Un point de départ au demeurant borderline qui n’empêche cependant pas l’éclosion d’œuvres fortes et dignes d’intérêt, à commencer par l’inconfortable I Spit on Your Grave de Meir Zarchi (1978), bien plus estimable que le remake éponyme dispensable qu’en tira Steven R. Monroe en 2010. Fort heureusement, Coralie Fargeat, à la fois scénariste et réalisatrice du projet, choisit une approche différente de celle, abracadabrante, de ce dernier (au sein duquel l’héroïne se transformait tout de même en MacGyver de la torture dans sa dernière partie).

Tout d’abord, le choix du rape and revenge pose la question épineuse de la représentation du viol. Trop en montrer peut faire basculer le film dans une complaisance malsaine, voire amoindrir la vengeance du personnage principal. À l’opposé, ne pas en montrer assez revient à enlever l’impact nécessaire à la pleine justification de la partie revancharde. Coralie Fargeat fait le choix de l’entre-deux, en privilégiant le hors-champ, puis en insistant sur la partie de l’histoire qui tourne autour de la  tentative de survie de son héroïne.

Cela s’avère payant, d’autant que la réalisation fait preuve d’un bel aplomb, couplé à une photographie soignée, mais surtout à un traitement sonore travaillé de manière à conférer de l’impact supplémentaire à chaque passage. Et d’impact, Revenge n’en manque pas.

Filmant les corps au plus près, la réalisatrice n’hésite à aucun moment lorsqu’il s’agit de montrer les blessures plein cadre. Le film ne rechigne ainsi jamais à verser dans un gore agressif qui contraste avec les magnifiques paysages marocains mis en scène qui confèrent au long-métrage de légers airs de western.

À cela s’ajoute un jeu ludique sur l’inversion des rôles, qui se retrouve au sein même de la mise en scène, et dont le symbolisme utilisé, bien que parfois trop appuyé, aide à faire passer les passages les moins crédibles d’une intrigue qui mise avant tout sur une efficacité redoutable. Cela permet de pallier l’autre défaut majeur du film, à savoir des dialogues parfois gênants, mais heureusement peu nombreux.

Il n’en faut pas plus pour faire de Revenge un premier film prometteur, qui va droit à l’essentiel, et qui parvient à transcender ses faiblesses en faisant preuve d’une belle fougue. Autant dire que l’on attend le prochain projet de Coralie Fargeat avec impatience.

A propos Guillaume Limatola 126 Articles
Journaliste