No War, récit d’une société chamboulée

Scénario et dessin : Anthony Pastor
Editions : Casterman
Sortie :  09 janvier 2019
Genre : Thriller

En janvier 2019, est paru aux éditions Casterman le premier des 3 tomes de la série « No War ». Thriller sur fond de tensions entre intérêts économiques et respect des traditions et des terres des peuples autochtones, l’album est l’œuvre d’Anthony Pastor, déjà remarqué pour « Ice cream » en 2006 et Castila Drive (lauréat du Fauve polar du festival d’Angoulême 2013). Dans « No War », il nous emmène au Vulkland, archipel fictif dans lequel les tensions de classes mais également la question de l’identité forment un cocktail explosif.

Fils d’une activiste autochtone kivik et d’un père ingénieur en charge d’un projet de barrage qui profanera les territoires sacrés kivik, Run tente de naviguer entre des opinions contradictoires, sans pour autant choisir l’un ou l’autre camp. Mais le résultat des élections et l’assassinat d’un ingénieur travaillant sur le projet de barrage vont emmener le Vulkland dans un engrenage de violence auquel Run et ses amis n’échapperont pas.

Anthony Pastor a imaginé le territoire du Vulkland, qui est un concentré des nombreux problèmes que l’on décèle dans notre société actuelle. On y retrouve l’accaparement des richesses par une élite, le risque de déclassement social et économique, l’urgence écologique, ainsi qu’une réflexion sur la colonisation. Grâce à un récit au rythme soutenu, il nous offre dans ce premier tome les clés pour approfondir les différentes thématiques et déjà entrevoir la catastrophe qui se prépare dans notre propre société. En prenant comme héros le personnage de Run, tiraillé entre ses origines antagonistes, l’auteur échappe au traitement manichéen du sujet et nous place en spectateur d’une tragédie en devenir.

Si la BD se lit avec intérêt et d’une traite, le traitement graphique du récit en rebutera peut-être certains. Faisant écho à la violence et à la dureté de l’histoire, Anthony Pastor choisit un style assez abrupte et sec. Les traits sont nerveux et saccadés et la palette des couleurs renforce la dureté de l’exposé. L’auteur a choisi celle-ci dans les tons bleus/gris qui renforce à nouveau son caractère sombre.

« No War » est un album intéressant, qui renferme dans ses 130 pages de belles promesses au niveau scénaristique pour les prochains tomes. Néanmoins, il intéressera plus les lecteurs qui s’attachent au récit qu’à la beauté graphique de l’œuvre.