MED 2016 : Molenbeek : génération radicale de Chergui Kharroubi et José-Luis Peñafuerte

Molenbeek : génération radicale

de Chergui Kharroubi et José-Luis Peñafuerte

Documentaire

Présenté au dernier Festival du Film Méditerranéen de Bruxelles

Stigmatisé comme « le berceau européen du Djihadisme » par la plupart des médias européens voire mondiaux. Les deux journalistes belges, Chergui Kharroubi et José-Luis Peñafuerte, partent en expédition dans le 1080, au lendemain des attentats de Paris, afin de sonder la nouvelle terreur. A travers un panel d’intervenants, allant de l’éducateur aux jeunes habitants du quartier, Molenbeek : génération radicale passe la frontière du canal pour survoler un territoire classé à risque, uniquement bon, pour certain, à la destruction.

Comme en terrain hostile, nos deux réalisateurs sont guidés, « par nécessité », par une sorte de passeur incarné par Fouad, un éducateur de l’association Avicenne. L’engagement et la détermination de Fouad sont touchants, mais sa présence à l’écran, peut-être, au prorata de la parole des jeunes abordés, un peu trop présente. On aurait aimé un peu plus « d’aventure », ou du moins d’investigation dans le quartier, car finalement, de cette génération dite radicale (18-35), on ne voit que le porte-parole de la partie angélique de la conscience. Du haut de leurs 15 ans, les trois petits rappeurs apprentis sont bien là pour nous apporter une vision de leur point de vue mais le discours, encadré, est capturé trop rapidement. Sous le regard bienfaiteur, mais catalyseur de l’éducateur, les langues ont du mal à se délier. Comme si ces jeunes cherchaient la bonne réponse, leurs paroles semblent demeurer dans le factice et le discours rapporté. De la même manière, lors d’une réunion informative, c’est là encore le caractère didactique que l’on retrouve au dépend du dialogue.

Même si on le dit et le redit, les mosquées ne sont pas le centre névralgique du problème, elles sont évidemment, au dépend de leur volonté, liées à ce fléau de l’endoctrinement dénué pourtant de toute connexion à une quelconque religion. Cela dit, nous ne passerons le seuil d’aucune d’entre elles et n’écouterons les dires d’aucun de ses acteurs, dans un quartier qui en compte pourtant plusieurs centaines.

La mixité sociale, comme le dit un local, a tout simplement disparu au profit de préjugés qui s’enracinent depuis plus de deux décennies. Avec pour seule arme de défense – devant cette forme de ghettoïsation et un gouvernement qui depuis la première vague d’immigration n’a que très peu d’intérêt pour la problématique – leur motivation et l’entraide communautaire. C’est déjà là une première belle leçon de vie. Neuf mois d’investigation, c’est court pour un sujet dont tant de stigmates nécessitent d’être brisés, mais assez pour accoucher de l’émergence d’une conscience qu’il nous faudra entretenir et développer, au risque de voir se répéter, quelques-uns des plus dramatiques épisodes de notre Histoire.

A propos Audrey Lenchantin 56 Articles
Journaliste du Suricate Magazine