Les Misérables au Théâtre National

D’après le roman de Victor Hugo

De et avec la Compagnie Karyatides

Du 24 février au 7 mars 2015 à 20h30 au Théâtre National

Ce grand classique de Victor Hugo publié en 1862, fait ici l’objet d’une représentation très originale racontée sous forme de conte par Karine Birgé et Marie Delhaye, deux actrices de la Compagnie Karyatides qui nous initient par la même occasion au théâtre d’objet. Elles nous racontent Les Misérables à l’aide d’une foule de statuettes très détaillées, que l’on peut admirer sur scène à la fin de la représentation, et représentant les héros ou anti-héros, selon le nom qu’on veut bien leur donner, de l’histoire.

Cette pièce, qui est à la base un roman très long agrémenté d’un luxe de détails et de descriptions propre au Romantisme, courant artistique du début du XIXe siècle, est un protrait historique d’inspiration réaliste puisqu’il nous présente au moins trois grandes fresques : la fin de l’épopée Napoléonienne et la restauration de la monarchie jusqu’à l’émeute à Paris en juin 1832. Autrement dit, une période extrêmement trouble de l’histoire de France.

Dans ce cas précis, l’œuvre de Victor Hugo a été découpée et synthétisée mais sans dénaturer l’essence même de l’œuvre et du message que son auteur à voulu nous transmettre : la justice sociale, les rapports entre dominants et dominés, le destin individuel ou collectif, les combats entre le bien et le mal, la misère sociale, le respect de la loi sociale opposé au respect de la loi morale, … Chaque scène est centrée sur un personnage spécifique qui s’ils ont tous un lien entre eux, n’en ont pas moins un destin propre et un message à livrer.

La mise en scène est tellement bien réalisée qu’elle en devient magique. Il est rare en effet d’avoir des jeux de son et de lumière aussi pointilleux et millimétrés et qui complète aussi bien le jeu de scène où les actrices jouent les différents rôles tour à tour, autour d’une table qui forme une scène dans la scène, une mise en abîme de l’histoire dans l’Histoire. On y retrouve Jean Valjean le bagnard repenti, Fantine victime de l’injustice sociale, Cosette l’enfant maltraitée, l’inspecteur Javert à la poursuite de la vraie justice, et bien d’autres. Un superbe décor de la ville de Paris au XIXe siècle est peint sur une toile déployée comme fond de scène. La musique et les bruitages sont lancés à la seconde près… Il a certainement fallu énormément de travail de synchronisation en amont pour en arriver à ce niveau de perfection. La table qui est au centre de la scène est équipée d’un dispositif ingénieux pouvant rouler et permet à la planche centrale de tourner comme les ailes d’un moulin à vent. Tous ces détails rajoutent de la magie dans une pièce où les thèmes abordés sont sombres et tristes.

La manière dont la pièce est travaillée est également très moderne notamment avec le porte-voix qui évoque nos propres manifestations faisant le lien avec le soulèvement de Paris en 1832. Cela nous interroge, nous rappelle que depuis le début du XIXe siècle et donc de l’époque de Victor Hugo, rien n’a vraiment changé : les injustices se multiplient, il y a de plus en plus de guerres et les gens meurent de faim par milliers.

Un spectacle inédit et surprenant sur un grand classique de la littérature française ayant fait l’objet de nombreuses adaptations tant théâtrales que cinématographiques. On se demande un peu au début à quelle sauce on va être mangé, mais la magie de la scène fait le reste. Une jolie découverte.

A propos Daphné Troniseck 254 Articles
Journaliste du Suricate Magazine

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