Kiss kiss, Bang Gang

bang gang poster

Bang Gang

d’Eva Husson

Drame

Avec Finnegan Oldfield, Marilyn Lima, Daisy Broom

Sorti le 27 janvier 2016

Un groupe d’amis crée un jeu à caractère sexuel, le « bang gang », sans se douter que le phénomène va peu à peu prendre de l’ampleur, notamment grâce au partage d’informations sur les réseaux sociaux, et aboutir à la création de véritables soirées orgiaques. Ce qui n’ira pas sans répercussions, les participants ayant tous autour de 16-17 ans.

Un tel sujet n’aurait sans doute pas été renié par Larry Clark. Au cours de sa carrière, ce photographe et cinéaste américain n’a eu de cesse d’observer une certaine jeunesse, de même que ses dérives. Si Bang gang emprunte une voie moins dépressive, faisant parfois même preuve d’humour, quelques similitudes émergent néanmoins. Comme dans Impaled, segment que Clark a réalisé pour l’anthologie Destricted, nous nous trouvons ici en présence de jeunes ayant grandi avec l’omniprésence de la pornographie, et dont le comportement peut s’en trouver influencé. Ce constat est amené en filigrane par la réalisatrice Eva Husson, qui préfère cependant soulever des questions que d’en apporter les réponses. Il faut dire que là n’est pas le réel sujet du film qui peut avant tout être interprété comme un conte initiatique, narré du point de vue des adolescents mis en scène.

Si l’histoire s’inspire d’un fait divers survenu aux Etats-Unis au cours des années 90, l’action est ici transposée dans un Biarritz que la réalisatrice se ré-approprie. Devant sa caméra, la ville se transforme et prend des allures de lieux clos, quasi-coupé du reste du monde. Cet état de fait se révèle être en adéquation avec des jeunes imprégnés par un fort sentiment de solitude. Ils vont néanmoins peu à peu réussir à s’en défaire, grâce à l’émulation de groupe.

En suivant leur parcours, le film s’attarde sur leur évolution, au travers d’expérimentations plus ou moins transgressives. Les scènes d’orgies sont, à ce titre, loin d’être gratuites. Chaque participant y trouve à la longue le moyen de s’affirmer. La facilité déconcertante avec laquelle le phénomène des « bang gang » se met en place à de quoi déconcerter, mais se révèle à l’unisson avec un long-métrage qui aborde des sujets difficiles avec une apparente simplicité rafraîchissante. Et qui sonne souvent juste, à l’image d’un scène présentant l’un des héros au téléphone avec sa mère. Au sortir d’une soirée mêlant sexe à partenaires multiples et MDMA, il lui parle comme si de rien n’était, cristallisant un état mêlant insouciance et émancipation vis-à-vis des adultes.

L’interprétation convaincante pourrait déclencher chez le spectateur une impression de voyeurisme désagréable. Elle est néanmoins atténuée par une réalisation aérienne et esthétisante, qui observe les différents protagonistes en ayant le bon goût de ne pas les juger. Appuyée par la photographie solaire de Mattias Troelstrup, une certaine tendresse émerge même, face à ces jeunes qui se cherchent. Si leurs actes peuvent sembler déplacés, ils n’en découlent pas moins d’une recherche d’acceptation, passant par une forme de liberté euphorisante. Aveuglante, même, si l’on en juge leur désinvolture face au partage des vidéos de leurs soirées sur internet. Si le dernier acte pourrait être qualifié de quelque peu moralisateur, il marque également la fin d’une époque et la perte d’une certaine fougue qui permettait de dépasser ses propres limites.

A propos Guillaume Limatola 126 Articles
Journaliste

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