Kings, un brûlot qui ne fait ni chaud ni froid

Kings

de Deniz Gamze Ergüven

Drame

Avec Halle Berry, Daniel Craig, Lamar Johnson, Rachel Hilson

Sorti le 4 juillet 2018

Après des débuts prometteurs avec Mustang, traitant de la condition féminine en Turquie à travers l’histoire de cinq sœurs, la réalisatrice franco-turque choisit avec Kings de s’attaquer à un sujet tout aussi tragique et révoltant, le racisme aux États-Unis et plus particulièrement, celui de la police envers la communauté afro-américaine.

Le récit se déroule dans le contexte des émeutes qui ont surgi à Los Angeles en avril 1992, suite à l’acquittement de quatre policiers blancs filmés en train de tabasser Rodney King, un automobiliste noir arrêté pour excès de vitesse. Cet événement a mis le feu aux poudres à South Central, le quartier populaire afro-américain de Los Angeles, déjà pas mal secoué depuis le meurtre de Latasha Harlins, une jeune fille noire, par une commerçante coréenne qui la soupçonnait à tort de lui voler une bouteille de jus d’orange.

Deniz Gamze Ergüven utilise ces événements comme toile de fond en se concentrant sur le personnage de Millie, une mère courage recueillant des enfants en attente d’adoption. Celle-ci tente tant bien que mal de les élever correctement tout en livrant des gâteaux pour pouvoir subvenir aux besoins de cette famille recomposée pas comme les autres. Elle peut compter sur Jesse, le plus âgé, pour l’aider dans sa tâche difficile. Mais quand arrive William, un adolescent bien décidé à se venger de la police, ce fragile équilibre est mis à mal.

Pour un sujet comme celui-là, le fait de traiter la grande Histoire par la petite aurait pu très bien fonctionner si cela n’avait pas été fait avec une telle impression de confusion. En effet, il semble que la réalisatrice se soit perdue dans des intrigues secondaires assez plates et quelque peu impromptues comme le rapprochement entre Millie et son voisin acariâtre en apparence. En voulant multiplier les points de vue, le traitement des personnages et des situations souffre d’un manque de profondeur, ce qui fait perdre au spectateur toute occasion de s’attacher aux protagonistes et de partager leurs souffrances. L’usage quasi constant de plans rapprochés en caméra portée, mêlé à des images d’archives montrant le passage à tabac de King et le procès des policiers, reflète bien l’atmosphère de chaos qui devait régner dans la ville. Malheureusement, il contribue également au sentiment d’embrouillamini qui finit par fatiguer le spectateur.

Le scénario et la mise en scène n’étant pas très convaincants, on essaye de se raccrocher à l’interprétation des acteurs, mais là encore on éprouve une certaine déception face à une Halle Berry et un Daniel Craig manquant parfois de crédibilité. Seuls les jeunes acteurs, et plus spécifiquement le trio d’adolescents, parviennent à susciter notre empathie. Dommage qu’ils ne soient pas plus présents à l’écran…

A propos Julie Vermandele 24 Articles
Journaliste du Suricate Magazine