Les enfants de l’araignée, de Mario Tamura

Scénario & dessin : Mario Tamura

Éditions : Casterman

Sortie : 18 octobre 2017

Genre : Science-fiction

Au même titre que le quasi-contemplatif Snegurochka d’Hiroaki Samura où que le plus déviant Litchi hikari club d’Usamaru Furuya, Les enfants de l’araignée fut prépublié au Japon au sein du défunt bimensuel Manga Erotics F. Au vu des deux exemples précédemment cités et tous deux fortement recommandables, force est de reconnaître qu’il pourrait s’agir là d’un gage de qualité. Ce n’est pas le one shot de Mario Tamura qui viendra prouver le contraire.

Articulé autour de plusieurs personnages qui se démènent dans un futur post-apocalyptique faisant suite à une guerre nucléaire, Les enfants de l’araignée semble porté par l’énergie du désespoir. Il fait la part belle à une noirceur quasi totale qui ne semble pourtant jamais forcée, en cela qu’elle est constamment contrebalancée par la force des personnages principaux que rien n’empêche de vouloir s’en sortir. Cet équilibre irrigue l’album au complet et lui permet d’alterner entre joie et peine, déception et détermination, violence et respiration. Le dessin, qui parvient à être élégant tout en ne cachant rien des moments les plus dérangeants de l’intrigue, se met au diapason de cet état de fait. L’auteur n’hésite ainsi pas à effectuer quelques changements de style bienvenus pour souligner la force de certaines séquences déjà portées par un découpage des plus efficaces.

La justesse ainsi atteinte pousse le lecteur à suivre les aventures des différents protagonistes avec une attention non feinte, d’autant que le suspense et les enjeux s’intensifient page après page. Mario Tamura n’a à ce titre pas son pareil pour faire ressurgir certains éléments au demeurant anodins pour leur donner une nouvelle signification qui vient amplifier leur importance.

Cette impression que tout est lié homogénéise un récit au demeurant disparate et le rend de plus en plus prenant. Le rythme va également en s’accélérant jusqu’au sprint final qui en laissera plus d’un à bout de souffle. Autant dire qu’il est difficile de lâcher l’ouvrage après l’avoir commencé, surtout qu’il dresse un constat alarmant sur une société dystopique pas si éloignée de la nôtre.

En intégrant notamment des rafles de réfugiés ainsi que l’épuisement des ressources énergétiques au sous-texte de son scénario, Les enfants de l’araignée aborde des thèmes qui restent toujours d’actualité plus d’une quinzaine d’années après sa publication originale. N’allez pas croire pour autant que l’auteur appuie son message à outrance, bien au contraire. Oscillant entre empathie et envie de tout foutre en l’air, le scénario prend bien soin de laisser le lecteur se faire son propre avis sur son issue finale. Énergique, tendue et parfois éprouvante, cette première publication française d’un manga de Mario Tamura donne fortement envie d’en découvrir plus. Un auteur à suivre, donc !

A propos Guillaume Limatola 126 Articles
Journaliste