Emile, patriarche des Servan-Schreiber de Monique Nemer

emile, patriarche des servan-schreiber couverture

auteur : Monique Nemer
éditions : Eyrolles
sortie : janvier 2015
genre : Biographie

Au centre de cette vaste fresque qu’est la dynastie de presse Servan-Schreiber, il y a le père fondateur, à la fois journaliste et patron : Emile Servan-Schreiber. Benjamin des trois fils d’une famille d’origine allemande et juive émigrée à Paris, l’homme va connaitre un parcours singulier dans la première moitié d’un 20ème siècle marqué par les aléas de l’histoire.

Dans sa biographie, Monique Nemer s’empare donc du puzzle d’une vie, celle du patriarche d’une famille influente, tout en faisant régulièrement surgir au premier plan les membres notables du clan. A partir de témoignages familiaux, de correspondances privées, mais aussi d’essais et d’éditoriaux, l’auteure retrace l’itinéraire d’un amoureux des mots, à la fois résolument moderne et attaché aux simples bonheurs familiaux. Des tribulations de sa jeunesse à son exil forcé aux heures les plus sombres de l’histoire en passant par son maïorat, la trajectoire d’Emile Servan-Schreiber se déploie, dans ses plus grandes lignes, en Argentine, entre Paris et province, à Megève et dans le Pays de Caux.

Au départ de l’ascension familiale des Servan-Schreiber, il y a le modeste mensuel créé par Robert (le frère aîné d’Emile), les Echos de l’Exportation qui prendra au fil du temps la forme d’un prestigieux quotidien économique les Echos. Co-fondateur du journal économique qu’il dirigera pendant cinquante ans, dont quarante conjointement avec son frère, Emile va accompagner la modernisation de la presse entre les deux guerres en délimitant, entre autres, les frontières poreuses entre information et publicité. Dans les années 20, le journal se dote de rédacteurs spécialisés et part à la conquête de nouveaux lecteurs avides d’information objective et de services spécifiques. Les frères opèrent ce virage sans pour autant renoncer aux annonces publicitaires nécessaires à la finance et donc à la garantie de textes de qualité. Le duo fraternel décide de mieux cloisonner celles-ci en faisant évoluer les annonceurs vers plus d’inventivité, d’imagination car « la publicité ne se lit pas, elle se regarde » ; ce qui offrira plus de clarté et de lisibilité au quotidien qui deviendra une référence de la presse économique avant la seconde guerre mondiale.

Humaniste, passionné de technologies et grand voyageur, Emile parcourt le monde dans les années 30, pour ses reportages et ses essais, à l’affût de nouvelles inventions et de progrès social. Soucieux de construire une descendance française, il se marie à une catholique, Denise Bresard, et fonde une fratrie de cinq enfants dont l’aîné Jean-Jacques sera le fondateur en 1953 de l’hebdomadaire à succès l’Express. Mais chez les Schreiber, celui que tout le monde surnomme JJSS n’est pas le seul héritier à avoir le goût de l’écriture. Emile a su transmettre et partager ses valeurs humanistes, ses intérêts pour les questions de société et son goût pour la littérature à bon nombre de ses enfants et petits-enfants (Christiane Collange, Jean-Louis, Brigitte, David,…) qui tomberont dans l’écriture de manière contagieuse et quasi-patronymique.

Grâce à son remarquable travail documentaire, l’auteure Monique Nemer parvient à donner de l’éclat et de l’amplitude à la vie d’Emile Servan-Schreiber. Dans sa biographie, elle avance intelligemment sur deux fronts à la fois, en filant près de cent ans d’histoire, de la Belle Epoque à la République gaullienne, tout en retraçant le portrait d’un grand homme de presse, figure tutélaire d’une lignée de journalistes bien assurée.

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