Candy Crush, un casino en pain d’épices

Ce n’est plus un secret, le monde gravite autour d’internet et de ce qu’il offre de plus tendance. Aujourd’hui, difficile de vivre une vie socialement active sans détenir un compte sur l’un des grands réseaux sociaux, comme Facebook, WhatsApp ou Twitter. De fait, les invitations fusent sur ceux-ci et le souvenir physique de vos amis passe souvent par leur souvenir virtuel, autrement dit, il faut être vu pour ne pas être oublié.

Mais récemment, la « super » connectivité a connu un deuxième élan grâce aux smartphones (par exemple sur iPhone et IOS 8) et leurs fameuses applications mobiles appelées Apps. L’expansion des jeux mobiles est incontestable et omniprésente sur le web. Pour s’en rendre compte, il suffit de faire un petit tour sur la page de Browsergames : pléthore de jeux à télécharger pour mobiles nous y attendent. Il n’a jamais été plus simple ni plus rapide de souscrire à un jeu vidéo via une application. Et à partir de l’instant où le consommateur télécharge l’une d’entre elles, il accepte – sans s’en rendre compte – d’en devenir dépendant. Pour quelles raisons nous direz-vous, puisqu’il suffit de le supprimer ? C’est sans compter sur l’ingéniosité des startups qui travaillent d’arrache-pied pour que vous ne vous déconnectiez pas, et cela fonctionne.

Prenons l’exemple de Candy Crush Saga. Ce jeu à la renommée mondiale créé par King, une société londonienne, est probablement l’un des plus téléchargés au monde. Comme beaucoup d’autres certes, mais l’avantage de ce jeu de casse-briques/puzzle est d’être quasiment interminable. Sa longévité est donc infinie, d’autant que ses créateurs ajoutent régulièrement des nouveaux niveaux, voire des franchises annexes (Candy Crush Soda).

L’addiction faite, le consommateur est alors happé dans un monde dont il ne sortira quasiment plus… à l’instar des locaux des grandes sociétés de la Silicon Valley. Dans Candy Crush Saga, tout est fait pour vous attirer : une inter-connectivité avec vos amis, un classement compétitif, une interface fluide, des couleurs vives, une complexité évolutive et des possibilités de triches. Si ce dernier point vous parait surprenant, il s’agit pourtant d’une idée cruciale développée par la société aujourd’hui basée à Stockholm.

D’après les statistiques, le joueur ne peut pas être bloqué trop longtemps sur un niveau, le risque de décrochage est alors bien réel. King, comme d’autres entreprises, ont donc inséré un nombre important de possibilités d’esquive. Vies offertes par les amis ou achetables via carte de crédit, effets surpuissants offerts aléatoirement ou achetables, ou même passages de niveaux moyennant finances. L’idée est d’avancer et, si besoin est, d’acheter son avancée. Un comble auquel ne cèdent pas tous les utilisateurs, mais plus de 30% d’entre eux passeraient tout de même le cap.

Cette minorité finance le jeu de la même manière que l’on finance un casino. Et c’est là que débute toute l’ambiguïté d’une telle entreprise. Alors qu’on le pense inoffensif et enfantin (à en admirer ses graphismes), Candy Crush Saga propose à ses joueurs d’échanger leur monnaie virtuelle (en l’occurrence des lingots d’or) contre des objets ludiques mais diablement utiles. Une monnaie qui s’achète avec une véritable carte de crédit mais, effet pervers, que l’on vous offre gracieusement en faibles quantités pour susciter le besoin mais aussi pour en atténuer la valeur relative. Pour terminer, le jeu va même jusqu’à faire des campagnes de promotion.

Ce constat établi, il est dès lors judicieux de se poser la question ultime : doit-on interdire ce genre de jeu aux mineurs d’âge, tout comme c’est le cas pour les jeux d’argent en ligne ? La question mérite d’être creusée. D’autant que, même si la société affirmait il y a deux ans à Metronews que 91% des joueurs avaient plus de 21 ans, on doute que la démocratisation des smartphones et leurs ventes en constante évolution chez les jeunes ne séduisent davantage de petites têtes blondes.

La question est posée sur le bien-fondé des achats in-app et leur mise à disposition à un public mineur. Mais quoiqu’il en soit, votre boulimie de sucreries virtuelles n’est en rien hasardeuse, on vous l’assure.

A propos Matthieu Matthys 919 Articles
Directeur de publication - responsable cinéma et littérature du Suricate Magazine.

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