Baby Phone, toute l’exiguïté du huis clos

Baby Phone

d’Olivier Casas

Comédie

Avec Medi Sadoun, Anne Marivin, Pascal Demolon

Sorti le 8 mars 2017

Devenu père, Sébastien est sur le point de lâcher son rêve – vivre de sa musique – au profit d’un job plus sûr et surtout plus lucratif. Alors qu’il promet à sa femme de prendre enfin ses responsabilités pour le besoin de la famille, Seb organise un repas avec ses parents et ses deux amis, Pascal et Arthur. Mais alors que les deux acolytes se retrouvent seuls à contempler le bébé endormi dans sa chambre, ils se lâchent sur leurs hôtes, sans se douter que ces derniers les entendent.

Baby Phone fait partie de ce sous-genre ayant le vent en poupe dans la comédie française, à savoir le huis clos théâtral. De fait, si le monde du cinéma hexagonal semble ne pas avoir réussi à trouver un nouveau souffle dans le genre comique, on peut aisément dire que les adaptations théâtrales sous forme de huis clos flirtent chaque fois avec le succès. En cause, un humour davantage axé sur le verbe que sur le geste, et cela, le public en redemande.

Olivier Casas l’a bien compris. En adaptant son court-métrage éponyme au format long, le réalisateur pensait pouvoir tutoyer ses illustres prédécesseurs que sont Francis Veber (Le dîner de cons), Alexandre de La Patellière et Matthieu Delaporte (Le Prénom) ou encore Cédric Klapisch. D’ailleurs, c’est probablement à ce dernier, et à son très drôle Un air de famille écrit par Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri, qu’Olivier Casas doit son goût pour le huis clos familial.

Mais voilà, le cinéaste français semble avoir omis une chose avant de réaliser son long métrage. En effet, celui-ci a occulté le fait que son scénario, aussi fourni soit-il, est loin de côtoyer la richesse drolatique de ses pairs. En outre, si l’idée d’utiliser un objet du quotidien, le baby phone, comme instrument de la discorde familiale est excellente, Olivier Casas a oublié d’enrober son effet avec un univers crédible. Cela a comme conséquence de voir un Sébastien (Medi Sadoun) en quête d’une improbable reconnaissance artistique ; de dévoiler une Charlotte (Anne Marivin) au bord de la crise de nerfs versant son venin sur des invités qui ne lui en tiennent pas vraiment rigueur ; de présenter un duo parental tout droit sorti de la maison de soins ; et de nous coltiner une paire d’amis improbables et excessivement ingrats. Bref, le rendu fait davantage penser à une adaptation de bande dessinée plutôt qu’à celle d’une pièce de théâtre.

Malgré ces défauts très dommageables, les acteurs s’en sortent étonnement bien. D’un Pascal Demolon décidément sous-exploité au cinéma à un Medi Sadoun affranchi de son étiquette de fausse racaille, le casting est assez sexy et prouve d’autant plus qu’avec des personnages mieux travaillés, il aurait fait mouche à coup sûr.

En résumé, Olivier Casas a vu dans son histoire un vaudeville digne des plus grands théâtres ou une comédie de moeurs à la Molière. Une mauvaise vision puisque son histoire se serait davantage émancipée en s’affranchissant du huis clos dans lequel elle est enfermée.

A propos Matthieu Matthys 919 Articles
Directeur de publication - responsable cinéma et littérature du Suricate Magazine.